06 juin 2025
Bulletin interne de l'Institut Pasteur
En amont du Town hall qui aura lieu le 30 juin prochain, la direction générale et la direction de la communication et des affaires publiques vous proposent de partir à la rencontre des chercheuses et chercheurs responsables des priorités scientifiques du plan stratégique afin d’en savoir plus sur leur rôle, les enjeux de leur priorité, les principaux projets mais aussi les temps forts à venir.
Entretien avec Gérard Eberl,
responsable de l'unité Microenvironnement et immunité,
porteur de la priorité 3, “Origines des maladies”
► Pouvez-vous nous présenter la priorité scientifique qui vous a été confiée au sein du plan stratégique Pasteur 2030 ?
La priorité scientifique qui m’a été confiée est l’étude de l’origine des maladies chroniques non-infectieuses, mais dont la cause peut être un microbe. C’est très vaste, tous les départements scientifiques sont potentiellement concernés. Nous parlons ici de maladies qui sont en augmentation partout dans le monde, d’évolution lente mais souvent dramatique, liées à des séquelles d’infections (VIH, Covid, Chlamydia, Leishmania, Candida...), mais aussi des déséquilibres du microbiote, des maladies inflammatoires chroniques, des maladies auto-immunes, des allergies, du cancer, de l’obésité, du diabète, d’Alzheimer, de Parkinson ou encore de la dépression. Ces maladies se développent souvent tard dans la vie, dont les facteurs s’accumulent tout au long de la vie. Si la question de savoir “Pourquoi développe-t-on la maladie de Parkinson, ou un cancer ?” peut paraitre simple, la réponse ne l’est pas, car ces maladies sont multifactorielles. Qu’est-ce qui fait qu’une personne va effectivement développer un cancer ? Est-ce une question de génétique, une question liée à son histoire individuelle, à son environnement, son style de vie, aux microbes qu’elle a rencontrés dans sa vie ? La question de fond - maladie infectieuse ou pas - est pourquoi tombe-t-on malade ? Quelle est la conjonction néfaste de facteurs qui fait que finalement nous tombons malades ? Et c’est tout l’enjeu de fond et la philosophie de cette priorité 3 : comprendre cette multi-factorialité afin d'identifier des marqueurs prédisposants, trouver des solutions pour la prévention, et des solutions thérapeutiques adaptées.
► Comment l’Institut Pasteur se démarque-t-il de ses concurrents pour aborder des questions de santé à ce point multifactorielles ?
L'institut Pasteur possède un atout unique : la multidisciplinarité scientifique (13 départements et 13 disciplines), sur un même campus à taille humaine, ce qui permet d’établir facilement des liens entre scientifiques de disciplines diverses. C’est d’ailleurs ainsi que j’ai commencé à faire de la neuro-immunologie : en croisant mon collègue neuroscientifique au bout du couloir ! Neurologie et immunologie : deux disciplines a priori distinctes et pourtant étroitement liées à l’Institut Pasteur.
Les projets multidisciplinaires qui se développent au sein de la priorité dont je suis responsable au sein du plan stratégique incluent, à titre d’exemples, les maladies liées à la grossesse et la fécondité, les maladies inflammatoires, les maladies mentales, le cancer ou encore les maladies liées au vieillissement... Tous les départements sont mobilisés.
C’est vraiment l’ADN de l’Institut Pasteur d’être multidisciplinaire, tout comme la nature des maladies étudiées est multifactorielle !
► Comment se structure votre travail ?
Très concrètement, chaque priorité dispose d’un budget qui lui permettra, entre autres, d’organiser l’animation scientifique, par exemple autour de demi-journées ou déjeuners thématiques visant à réunir acteurs externes et internes pour créer des dialogues et des synergies scientifiques.
Au regard de la nature multifactorielle des maladies et du caractère multidisciplinaire des recherches conduites par mes collègues, j’ai choisi de structurer la priorité dont j’ai la responsabilité autour d’un comité de pilotage constitué d’un chercheur par département. Chaque unité de recherche peut d’ailleurs contacter cette personne pour y contribuer. L'idée de ce comité est de se réunir pour échanger, statuer sur des communications ou l’animation de l’axe ou encore sélectionner des projets. Ces questions d’animation scientifique sont justement en cours de réflexion ; nous envisageons par exemple de mettre en place des Seed Grants pour aider à cristalliser les idées et les projets. À ce jour, nous nous sommes réunis une première fois et avons pour objectif de nous voir tous les trois mois, ou de façon plus spécifique en fonction des projets.
Concernant toutes ces questions liées aux financements, à l’animation, à la communication en interne comme en externe, c’est un travail qui se fait en véritable partenariat avec la direction de la communication, la direction de la Philanthropie, la DARRI et la direction de l’enseignement, entre autres.
► Participerez-vous à des projets transversaux ? Si oui, lesquels ?
La priorité 3 est transversale par sa nature multidisciplinaire.
Nous travaillons en synergie avec tous les départements, mais aussi avec les responsables des autres priorités scientifiques du plan stratégique, afin d’échanger sur les idées de construction, les domaines de synergies et de convergence… Comme nous avons commencé à le faire avec nos collègues de la priorité 4 “Santé et maladie aux âges extrêmes de la vie”, avec lesquels nous avons des projets qui se recoupent étroitement.
En plus de cette multidisciplinarité, nous bénéficions d’une ouverture et d’une diversité géographique unique, avec les 33 Instituts du Pasteur Network. Le réseau est aussi un partenaire précieux pour l’axe 3. C’est une autre forme de transversalité. Nous sommes en contact avec la direction du Pasteur Network afin de programmer des échanges avec ses membres (séminaire de présentation et de discussion).
Et, comme évoqué plus haut, nous travaillons également avec les directions supports pour nous aider dans la structuration de notre priorité scientifique.
► Quel est votre objectif en tant que responsable de priorité scientifique d’ici 2030 ? Quel résultat comptez-vous atteindre ?
Les objectifs visés par cette priorité sont les suivants :
• Renforcer et institutionaliser l'esprit multidisciplinaire sur le campus et dans le réseau
• Définir des projets phares, dans cet esprit, pour affronter le défi des maladies chroniques et complexes
• Recruter des chercheurs capables de transcender les barrières des disciplines traditionnelles
• Inspirer l'éducation pour y favoriser la multidisciplinarité
• Définir une vision pasteurienne qui soit comprise par le public et les mécènes, et qui réponde à leurs attentes
• Travailler avec les industriels afin d'établir les intérêts communs sur ce type de maladies