06 janvier 2017
Bulletin interne de l'Institut Pasteur
• L’Institut Pasteur de la Guyane publie dans The Lancet la première séquence génétique complète du virus Zika circulant en Amérique
Après avoir confirmé les premiers cas d’infections au Surinam puis en Guyane, l’Institut Pasteur de la Guyane vient de séquencer le génome intégral du virus Zika responsable d’une épidémie sans précédent touchant actuellement dans la zone tropicale du continent américain. Publiée dans la revue The Lancet l’analyse de cette séquence montre une homologie quasi complète avec les souches à l’origine de l’épidémie qui a sévi en 2013 et 2014 dans le Pacifique.
En novembre dernier, sollicitée par ses collègues du Surinam, l’équipe du laboratoire de virologie de l’Institut Pasteur de la Guyane, Centre national de référence des arbovirus pour la région Antilles-Guyane, a confirmé les cinq premiers cas autochtones d’infection par le virus Zika au Surinam. C’est à partir de l’un des cinq échantillons que les chercheurs de l’Institut Pasteur de la Guyane viennent d’établir la séquence génétique complète de cette souche virale. Publiée dans la revue The Lancet, l’analyse de ce génome montre qu’il s’agit d’un lignage asiatique qui présente plus de 99% d’homologie avec la souche responsable de l’épidémie en Polynésie française en 2013. «Jusqu’ici peu de séquences intégrales de ce virus et aucune de la souche circulant actuellement en Amérique du Sud et en Amérique Centrale n’étaient disponibles. L’obtention de la séquence complète du virus est un point de départ important pour mieux comprendre l’évolution de son comportement», indique Dominique Rousset, responsable du laboratoire de virologie et du Centre national de référence des Arbovirus à l’Institut Pasteur de la Guyane.
• Confirmation d’un lien de causalité entre le virus Zika et les syndromes de Guillain-Barré
Grâce à des données recueillies en Polynésie française, des chercheurs de l’Institut Pasteur, du Cnam, de l’Institut Louis Malardé, du Centre Hospitalier de Polynésie Française, et de l’AP-HP, viennent de montrer que l’infection par le virus Zika est bien à l’origine de l’augmentation des syndromes de Guillain-Barré, forme grave de paralysie des membres avec atteinte respiratoire, observée dans les pays où sévit l’épidémie. Ce travail a été publié dans la revue The Lancet le 1er mars 2016.
• Zika et microcéphalie : le premier trimestre de grossesse est le plus critique
En analysant des données de l’épidémie de Zika de 2013-2014 en Polynésie française, des chercheurs de l’Institut Pasteur (Paris) et leurs collaborateurs polynésiens ont confirmé la survenue de cas groupés de microcéphalie et quantifié le risque de microcéphalie associé au virus : s’appuyant sur une modélisation mathématique originale, leur analyse montre que le risque de microcéphalie est de l’ordre de 1 % pour un fœtus/nouveau-né dont la mère a été infectée par le virus Zika durant le premier trimestre de sa grossesse. Ces travaux ont été publiés dans la revue The Lancet.
Une épidémie causée par le virus Zika touche actuellement un nombre important de pays de la zone Amérique. Cette émergence coïncide avec une explosion du nombre de suspicions de microcéphalie, une malformation neurologique grave caractérisée par des fœtus/nouveau-nés ayant des têtes de petite taille. Pour autant, les données issues de cette épidémie en cours, non consolidées, restent difficilement interprétables, notamment pour quantifier le risque de microcéphalie associé à une infection Zika.
• Zika : quelle porte d’entrée pour l’Europe ?
Afin d’étudier les différents scénarii possibles d’introduction du virus Zika en Europe, des chercheurs de l’Institut Pasteur ont mesuré la compétence vectorielle de quatre populations de moustiques Aedes, circulant sur l’île de Madère et dans le Sud de la France. Leurs travaux suggèrent que le moustique Aedes aegypti présent à Madère est plus enclin à soutenir une transmission locale du virus Zika qu’Aedes albopictus. Ceci suggère que les risques d’épidémie de Zika en Europe continentale demeurent limités.
Le virus Zika est un arbovirus de la famille des Flaviridae, transmis à l'homme par les moustiques du genre Aedes. Il a été à l’origine de plusieurs flambées épidémiques dans les îles du Pacifique Sud depuis 2007, et a atteint le Brésil en 2015. Aujourd’hui, il est présent dans plus de 34 pays d’Amérique latine et de la Caraïbe, affectant plus de 1,5 million de personnes. Corrélativement, le nombre de cas importés en Europe à partir du continent américain est, lui-aussi, en nette augmentation. Or, le moustique Aedes albopictus, présent dans 20 pays européens, et en France dans 30 départements, entrera en activité dès le mois de mai, quand les conditions climatiques seront favorables à son développement. Le risque d’une transmission locale du virus Zika en Europe est donc à craindre, et la question de la manière dont il pourrait être introduit sur le continent reste entière.
• Des anticorps efficaces contre le virus de la dengue et le virus Zika
Des chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS, en collaboration avec l’Imperial College (Londres) et avec l’Université de Vienne (Autriche), ont identifié des anticorps aussi efficaces pour neutraliser le virus de la dengue que le virus Zika. La description du site de fixation de ces anticorps sur l’enveloppe virale, identique chez les deux virus, laisse envisager la mise au point d’un vaccin universel capable de protéger simultanément contre la dengue et la maladie Zika. Ces résultats ont été publiés dans la revue Nature, le 23 juin 2016.
Le virus de la dengue et le virus Zika ont de nombreux points communs. Tous les deux appartiennent à la famille des flavivirus, des virus à ARN principalement transmis par des moustiques, et possèdent des protéines d’enveloppe similaires. Des chercheurs de l’Institut Pasteur, du CNRS et de l’Imperial College, qui avaient, dans une précédente étude, identifiés des anticorps capables de neutraliser les quatre formes du virus de la dengue, se sont intéressés au virus Zika. «Nous voulions voir si les anticorps isolés dans le cas de la dengue étaient capables de neutraliser d’autres virus de la famille des flavivirus, et Zika semblait être le meilleur candidat», expose Félix Rey, responsable du laboratoire de Virologie structurale à l’Institut Pasteur.
L’« International Zika Summit », un sommet international sur Zika de deux jours, s’est tenu sur le campus parisien de l’Institut Pasteur, en partenariat avec le Wellcome Trust, la Fondation Bill et Melinda Gates, l’Organisation mondiale de la Santé, REACTing, l’AVIESAN, les CDC américains et la Commission européenne.
Cette conférence visait à rassembler des scientifiques et des professionnels de santé publique mondiaux travaillant sur Zika.
Au vu de la vitesse de propagation et de l’ampleur de l’épidémie, déclarée par l’OMS d’urgence de santé publique de portée internationale, des collaborations spontanées entre les chercheurs, la communauté de santé publique et le grand public s’avèrent nécessaires. Plus de 600 chercheurs, académiques, médecins, professionnels de santé publique et journalistes scientifiques et grand public internationaux ont assisté à la conférence. Les scientifiques ont présenté les toutes dernières informations sur la situation épidémiologique en Amérique, les travaux de recherche sur les troubles neurologiques provoqués par l’infection par le virus Zika, les avancées diagnostiques en la matière, ainsi que les leçons tirées et progrès en termes de lutte antivectorielle et de développement vaccinal.
Vous pouvez consulter le programme final.
La conférence a permis aux scientifiques et professionnels de santé publique d’échanger publiquement sur les dernières découvertes des recherches sur Zika, et aux professionnels de santé publique et gouvernements de prendre ainsi des décisions éclairées sur les politiques de protection de la santé humaine à mettre en œuvre. L’Institut Pasteur et ses partenaires souhaitent partager les connaissances acquises au cours de cette conférence. Certains intervenants ont ainsi enregistré de courts entretiens synthétisant leur travail et détaillant les mesures qui en ont découlé. Ces vidéos seront accessibles sur les sites Web de l’OMS et de l’Institut Pasteur.