Disparition

Décès du Professeur Pierre Tiollais

La direction de l’Institut Pasteur a la grande tristesse de faire part du décès de Monsieur Pierre Tiollais, Professeur à l’Institut Pasteur, responsable de l’unité Biologie moléculaire des infections virales et cancérologie de 1979 à 2004.

Né le 8 décembre 1934 à Rennes, Pierre Tiollais était interne des hôpitaux de Paris et titulaire d’un doctorat en médecine de l’Université de Paris (1968). Il a commencé sa carrière à l'Inserm en tant qu'attaché de recherche en 1967, puis chargé de recherche en 1971. De 1970 à 1976, il a travaillé à l'Institut des maladies du sang à l'hôpital Saint-Louis à Paris. Il a été nommé Professeur agrégé et biologiste des hôpitaux en 1972, puis Professeur de classe exceptionnelle en 1991 à la Faculté de médecine Lariboisière-Saint-Louis.

En 1973, il a rejoint l’unité de Physico-chimie des macromolécules biologiques dirigée par Henri Buc à l’Institut Pasteur. En 1976, il a pris la responsabilité d’un groupe de recherche au sein de l’unité Génie génétique. En 1979, il a été nommé responsable de l’unité Recombinaison et expression génique qui est devenue ensuite l’unité Biologie moléculaire des infections virales et cancérologie. Il est devenu Professeur à l'Institut Pasteur en 1988 et Professeur de classe exceptionnelle en 2000. En 2004, il a été nommé Professeur émérite à l'Université Denis-Diderot et à l'Institut Pasteur, ainsi que Professeur honoraire de l'Institut de biochimie de Shanghai.

Spécialiste des technologies d'ADN recombinant, Pierre Tiollais a développé en 1975 le premier vecteur de clonage dérivé du virus bactériophage lambda. Il s'est ensuite particulièrement intéressé à l'hépatite B, une maladie pouvant causer la cirrhose et le cancer du foie. Avec son équipe, il a été le premier à cloner puis à séquencer le génome du virus de l’hépatite B (VHB). Au début des années 1980, son équipe a démontré la présence de séquences du génome du VHB dans le génome des cellules de l’hépatocarcinome, apportant ainsi un argument clé en faveur du rôle direct de ce virus dans le déclenchement de ce cancer. Par la suite, les travaux de Pierre Tiollais sur les antigènes viraux ont conduit au développement du vaccin recombinant contre l’hépatite B, produit à grande échelle et utilisé avec efficacité dans le monde entier.

Les travaux de Pierre Tiollais ont été reconnus par plusieurs distinctions scientifiques prestigieuses : prix Montyon de l’Académie des sciences (1985), prix Oberling (1985), prix Rosen de la Fondation pour la recherche médicale (1986), prix SOVAC (1988), prix de l’Académie nationale de médecine (1989), prix de recherche de la Fondation Athéna - Institut de France (1990), grand prix de la Fondation pour la recherche médicale (1990), grand prix de l’Institut électricité santé (1994) et prix recherche et médecine de l’Institut des sciences de la santé (1997). Il a été élu membre de l’EMBO (1984), membre correspondant puis membre de l’Académie des sciences en 1990 puis 1991 respectivement, membre de l’Académie nationale de médecine (1996), membre de la Chinese Academy of Engineering (1998), Docteur Honoris Causa de l’Université d’Uppsala (1989) et de l’Institut de Biochimie de Shangai (1999).

Pierre Tiollais était une figure emblématique de l’Institut Pasteur et un pionnier du génie génétique en France. Passionné et curieux, il était très apprécié de ses collègues et a été un mentor exceptionnel pour de très nombreux chercheurs.

Pierre Tiollais a été nommé Chevalier de la Légion d’Honneur et élevé au rang de Grand Officier dans l’Ordre national du Mérite.

Monsieur Pierre Tiollais est décédé le 5 août 2024 à l’âge de 89 ans.

La direction et le personnel de l’Institut Pasteur présentent à sa famille l’expression de leurs sincères condoléances.

 

Quelques mots, quelques pensées
 


« Il régnait dans le labo de Pierre une atmosphère magique. La complète liberté et la confiance totale qu’il nous accordait avec bienveillance se révélèrent un terreau fantastique à l’épanouissement et au succès de nombre de ses élèves. Avec des mots simples et un petit sourire au coin des lèvres, il voyait juste et allait à l’essentiel. Pour peu qu’une idée lui plaise, il y souscrivait, de sorte que des domaines aussi variés, parmi lesquels l’interféron beta, le clonage et séquençage du virus HIV ou les récepteurs de l’acide rétinoïque, finirent par cohabiter avec l’HBV dans un joyeux et stimulant melting pot dont je garde un souvenir sans pareil. Pierre, médecin avant tout, tenait sa force d’avoir, par une découverte et la mise au point du vaccin qui suivit, permis de sauver des millions de vies.

Ne se prenant pas au sérieux, il était tout aussi fier d’avoir son rond de serviette gravé à son nom au Select Bar où nous l’accompagnions les midis pour le rituel tarama, ou encore l’accord du gardien pour rentrer sa voiture le dimanche. Il était capable de s’emporter pour une collaboration trop lente à son goût sur un sujet brulant comme pour la nouvelle marque du savon au labo qui ne moussait pas, « vous comprenez Anne, un savon doit mousser pour laver correctement », dans un cas comme dans l‘autre, Pierre arrivait toujours à ses fins. Parfois il nous surprenait, un zeste de désinvolture assumée face aux tâches qui l’ennuyaient, ainsi le traitement des tracasseries administratives pouvait prendre la forme d’une boule de papier rejoignant prestement la corbeille. Je lui dois tant. »

Anne Dejean, responsable de l’unité de recherche Organisation nucléaire et oncogenèse
 

« Se souvenir de Pierre, en dehors de sa contribution scientifique, c’est se souvenir de sa gentillesse et de sa bienveillance. Il avait su créer au labo comme « une grande famille » en accueillant les nouveaux étudiants et post docs même après la fermeture de son unité. Pour ma part, il m’a toujours soutenue et encouragée pour progresser dans ma carrière scientifique. Je lui en suis très reconnaissante. »

Marie-Louise Michel, chercheuse invitée de l’Institut Pasteur, responsable de l’unité XX
 

« J’ai effectué ma thèse et plus tard, travaillé dans l’unité dirigée par Pierre Tiollais. J’ai été toujours très touchée par sa gentillesse, sa générosité et sa simplicité. Pierre Tiollais est un grand scientifique et l’incarnation même de l’humanisme, de l’esprit d’égalité. »

Yu Wei, chargée de recherche dans le laboratoire commun Institut Pasteur - TheraVectys
 

« Ce qui caractérisait Pierre Tiollais, et dont on prenait conscience à la première rencontre, c’est sa bienveillance. Cette qualité permettra à ses collaborateurs de s’épanouir dans son laboratoire sans redouter les reproches ou les jalousies inopportunes. Certains des plus grands noms de la science biologique et médicale française contemporaine sont donc venus faire leurs premières armes au laboratoire sous l’aile protectrice de Pierre. La deuxième qualité de Pierre est son ouverture d’esprit qu’il associait à une grande confiance dans ses collaborateurs. L’atmosphère ainsi créée a permis aux membres de son équipe de mener avec succès les projets de recherche les plus ambitieux. »

Pascal Pineau, chercheur au sein de l’unité de recherche Organisation nucléaire et oncogenèse

 

Imprimer