
Musée
Jean-Baptiste Jupille, le deuxième humain vacciné avec succès contre la rage en octobre 1885
Sur le campus, vous avez sans doute croisé entre l’accueil du 25 rue du Dr Roux et le bâtiment Metchnikoff la sculpture de Jean-Baptiste Jupille, jeune berger de 15 ans mordu par un chien enragé en octobre 1885 et vacciné par Louis Pasteur, il y a tout juste 140 ans.
Voilà son histoire…
Ce jeune berger, né François Jean-Baptiste Jupille le 30 novembre 1869 à Port-Lesney, dans le Jura, entre dans l'histoire par son courage et son rôle dans la démonstration de l'efficacité du vaccin antirabique mis au point par Louis Pasteur.
Un acte héroïque à Villers-Farlay
Le 14 octobre 1885 à Villers-Farlay, le jeune berger de de 15 ans est mordu à plusieurs reprises par un chien enragé en voulant protéger six autres jeunes bergers. Pasteur revient sur la bravoure du jeune garçon lors de son exposé du 26 octobre 1885 à l’Académie des sciences :
« L’Académie n’entendra peut-être pas sans émotion le récit de l’acte de courage et de présence d’esprit de l’enfant dont j’ai entrepris le traitement mardi dernier. C’est un berger, âgé de 15 ans, du nom de Jean-Baptiste Jupille, de Villers-Farlay (Jura), qui, voyant un chien à allures suspectes, de forte taille, se précipiter sur un groupe de six de ses petits camarades, tous plus jeunes que lui, s’est élancé, armé de son fouet au-devant de l’animal. Le chien saisit Jupille à la main gauche. Jupille alors terrasse le chien, le maintient sous lui, lui ouvre la gueule avec sa main droite pour dégager sa main gauche, non sans recevoir plusieurs morsures nouvelles, puis, avec la lanière de son fouet, il lui lie le museau, et, saisissant l’un de ses sabots, il l’assomme. »
La deuxième vaccination antirabique réalisée avec succès
Conscient de la gravité de l'accident, le maire de Villers-Farlay, Pierre Joseph Perrot, informé du succès de la vaccination de Joseph Meister en juillet, écrit immédiatement à Louis Pasteur, qu'il connait pour l'avoir rencontré à Arbois. Une collecte dans le village de Villers-Farlay permet de payer le billet de train pour Paris.
Le cas de Jean-Baptiste Jupille, avec des morsures datées de six jours avant son arrivée à Paris, présente des conditions moins favorables que celles de Joseph Meister. Cependant, Louis Pasteur accepte de le traiter et l'héberge dans une chambre annexe de son laboratoire, au 14 rue Vauquelin.
Le traitement commence le 20 octobre 1885 et se termine le 29 octobre 1885. Dix jours après les injections, Jean-Baptiste Jupille semble hors de danger et regagne le Jura début novembre. Louis Pasteur, satisfait du succès, déclare que " la santé de Jupille ne laisse également rien à désirer ". Jean-Baptiste devient ainsi le deuxième humain à être vacciné après morsure avec succès.
Reconnaissance et impact mondial
Louis Pasteur relate le succès de son traitement le 26 octobre 1885, à l'Académie des sciences. Cette nouvelle fait le tour du monde, consolidant la réputation de Pasteur et de son vaccin.
Suite à la proposition du baron Félix Larrey, l'Académie Française décerne à Jean-Baptiste Jupille le prix "de vertu" Montyon, une somme de 1 000 francs, destinée à récompenser un Français pauvre s'étant distingué par une action héroïque. De même, la Caisse des victimes du devoir lui accorde un livret de caisse d'épargne de 200 francs.
Une vie au service de l’Institut Pasteur
Plus tard, Jean-Baptiste Jupille toujours très reconnaissant à Louis Pasteur, intègre l'institut en 1890 à l'âge de 21 ans. Il y travaille successivement comme garçon de courses, puis garçon de laboratoire, avant de devenir concierge et enfin gardien-chef de l'Institut Pasteur. Il y retrouve Joseph Meister, également gardien de l’Institut Pasteur à partir de 1913. Il meurt en 1923.


L'engagement de la famille Jupille avec l'Institut Pasteur ne s'arrête pas là. Ses frères, Émile Jupille et Jean Frédéric Jupille, travaillèrent également à l'institut, ce dernier comme infirmier au service de la rage. Jean Frédéric Jupille est même crédité d'avoir participé à une campagne de vaccination antirabique au Caire et d'avoir travaillé au service de la tuberculose. Deux des enfants de Jean-Baptiste, Émile Florentin et Louise dite Olga, travaillèrent aussi comme laborantins à l'Institut Pasteur. Louise dite Olga fit toute sa carrière à l'institut, travaillant avec les professeurs Legroux, Calmette et Guérin, et reçut une médaille d'argent pour le cinquantenaire du vaccin en 1935.
Le courage de Jean-Baptiste Jupille est immortalisé dans deux œuvres d’art :
- Une sculpture en bronze, d’Émile-Louis Truffot (1843-1895), présenté dans le jardin de l’Institut Pasteur. Le musée conserve une version plus petite, actuellement exposé à la Villa du Temps retrouvé à Cabourg pour l’exposition « Louis Pasteur, l’art de la science ».

- La scène est aussi reprise sur la première mosaïque de la voûte de la crypte mortuaire de Louis et Marie Pasteur, réalisée par Charles-Louis Girault

Il figure sur un billet de cinq francs émis en 1966 par la Banque de France, à l'effigie de Louis Pasteur, où il apparaît dans la reproduction de la statue le représentant terrassant le chien enragé.


